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Et après ???


Nous ne sommes pas sortis — au propre comme au figuré — de cette épidémie qui bouleverse tous nos repères et nous pousse à réfléchir, à considérer nos vies, passées, présentes et futures.

Nous pouvons faire un premier constat, lorsque nous sommes sous pression, nous faisons ressortir ce qui est habituellement plus ou moins caché au fond de nous. Le meilleur et le pire. Nous sommes émerveillés par la révélation de ces cohortes d’héroïnes et de héros qui étaient parmi nous sans que nous le sachions, sans que nous le voyions et peut-être sans qu’eux-mêmes le sachent. La générosité, la solidarité, se manifestent aussi, sans oublier la créativité, chacun essaie de mettre au service des autres ce qu’il sait faire, ce que ses dons lui permettent de réaliser, de partager, et dans ces moments-là, nous sommes fiers de faire partie de la grande famille humaine.

Mais soyons honnêtes, le pire apparait aussi au grand jour. Par peur de la contamination, un propriétaire expulse, au mépris de la loi et de toute morale, des locataires qui vivent dans un logement proche du sien parce qu’il abrite la famille d’un soignant. Dans un grand pays, que je ne nommerai pas, les ventes d’armes ont augmenté jusqu’à 800 %, ailleurs des « commerçants » internationaux vendent à prix d’or, ou plutôt au prix du sang, des tests qui ne fonctionnent pas, des vampires de la finance rachètent, pour une bouchée de pain, ce que la crise arrache des mains d’honnêtes entrepreneurs, des responsables politiques mentent comme des arracheurs de dents — désolé pour les arracheurs de dents — pour essayer de couvrir leurs arrières et protéger le système qui les a placés en haut de la pyramide…

Les clivages sont exacerbés. Ceux qui militaient, depuis longtemps déjà, pour une terre propre, une décroissance organisée, pour la mort du capitalisme libéral, pour un retour à une vie plus simple, plus lente, plus locale se félicitent de ce bouleversement et commence à espérer que leur rêve devienne, contre toute attente, une réalité.

À l’autre extrémité, la petite minorité qui détient la quasi-totalité des richesses de la planète, après un bref moment de surprise, se réjouit des possibilités nouvelles que cette situation leur offre. Alors qu’il semblait impossible qu’ils accroissent encore leur pouvoir et leurs richesses, cette crise planétaire leur offre des opportunités inespérées.

Les uns et les autres sont dans leurs starting-blocks, attendant le coup de sifflet qui leur permettra de pousser leur avantage plus loin.

Et puis, il y a le « gros du troupeau » qui fait le dos rond en attendant que ça passe, qui espère récupérer à peu près ce qu’il avait avant, retrouver cette fausse liberté qui permet de ne pas trop réfléchir, de survoler sa vie sans être constamment confronté à des questions existentielles. Finalement, se dit le hamster, faire tourner la roue n’était pas si horrible que ça… elle pourrait être un peu plus colorée, un peu plus confortable, tourner un peu moins vite, mais dans le fond, ça tournait bien…

Nous savons que nous ne sommes pas au bout du tunnel, l’ombre du virus est encore bien présente. L’incertitude est notre seule certitude, mais il n’est jamais trop tôt pour se poser les bonnes questions, pour réfléchir posément à l’après, pour commencer dès aujourd’hui les changements qui nous semblent utiles pour demain.

« Au moment favorable je t’ai répondu, le jour du salut je t’ai secouru… 1 » annonçait le prophète Ésaïe, mais Paul reprenant ce texte ajoute : « Voici maintenant le moment favorable, voici maintenant le jour du salut 2 ».

Aujourd’hui est le seul jour où les choses peuvent arriver. Il est illusoire de s’imaginer que nous serons capables d’adopter, dans un hypothétique futur, ce que nous ne voulons pas choisir aujourd’hui. N’oublions pas que le monde dans lequel nous évoluons, et qui nous a conduit à ce que nous vivons, n’a pas été bâti par des démons ou des anges, il nous a été offert, à nous les humains, propre, neuf, en parfait état de fonctionnement durable. Et nous en avons fait… ce que nous avons sous les yeux aujourd’hui.

Nous ne pouvons pas changer les autres, nous ne pouvons pas changer la société dans laquelle nous vivons, nous ne pouvons même pas vraiment nous changer — ce n’est pas parce que nous sommes en avril que les bonnes résolutions sont plus efficaces qu’en janvier. Mais nous pouvons accepter de nous ouvrir au changement, l’accepter, y consentir. Et cela pourrait faire toute la différence…

Pour commencer, et parce que nous avons une mémoire de poisson rouge, il me semble utile de noter, peut-être pas dans le marbre, mais au moins sur du papier, nos réflexions quotidiennes. Ce que nous avons découvert, redécouvert, ce qui nous manque, ce qui a vraiment de la valeur, ce que nous avons appris sur nous même, sur ceux qui nous entourent, sur nos relations, ce que nous désirons pour la suite…

Ce n’est pas un hasard si la première tâche confiée à notre ancêtre commun « le Glébeux 3 » a été de donner un nom à chaque animal du Jardin. Nommer les choses est le point de départ de la conscience, si nous ne nous prenons pas en main, nos bonnes intentions sont semblables à de belles paroles écrites dans le sable humide au bord de la mer, elles n’existent que le temps d’une vague.

Nous avons besoin du conseil de Jacques, le frère du Christ, qui nous a laissé ces mots : « En effet, si quelqu’un écoute la parole et ne la met pas en pratique, il ressemble à un homme qui regarde son visage dans un miroir et qui, après s’être observé, s’en va et oublie aussitôt comment il était. Mais celui qui a plongé les regards dans la loi parfaite, la loi de la liberté, et qui a persévéré, celui qui n’a pas oublié ce qu’il a entendu, mais qui se met au travail, celui-là sera heureux dans son activité.4 ».

Mais attention de ne pas tomber, retomber, dans la religion « du faire » !

Nous devons réfléchir, choisir, en toute liberté et demander à notre Dieu de nous transformer, nous ne pourrons pas le faire tout seuls.

Il ne fera pas notre part, mais nous ne pouvons pas faire la sienne, cela s’appelle un partenariat. C’est ce qu’il désire plus que tout, que nous unissions nos forces, nos désirs : nous qui voulons, qui désirons, qui l’invitons et lui qui peux, qui est capable de nous transformer de l’intérieur vers l’extérieur.

Il faut comprendre le conseil de « mettre en pratique » dans le sens moderne « d’exécuter » en parlant d’un fichier informatique. Ce petit « double-clic » qui libère tout le potentiel contenu dans le programme.

Méditons, demandons-nous ce que nous désirons, notons-le pour ne pas oublier, et puis, avec un double-clic de consentement, accueillons la vie de Dieu en nous, elle seule peut nous changer, nous transformer, tout doucement, à son allure, à son rythme.

J’ai commencé ces lignes avec cette question : « Et après ? » Et après, je ne sais pas… demain ne nous appartient pas, et bien imprudent celui qui se risquerait à nous expliquer à quoi ressemblera notre futur, mais une chose est certaine, tant que nous pouvons dire « aujourd’hui », vivons l’instant qui compte, celui du présent, celui sur lequel nous pouvons agir, pour que « l’après » soit encore plus beau que « l’aujourd’hui ».


Présentement vôtre,

Philip

1— Ésaïe 49.8 2- 2 Corinthiens 6.1-2 3— Adam, dans la traduction Chouraqui. Litt. Tiré de la glèbe. 4— Jacques 1.22-25

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